7 graphiques qui montrent que l’écart des revenus conduira inévitablement à une crise sociale et politique

La semaine dernière, la Deutsche Bank a publié un rapport qui mettait la population en garde contre un ‘choc des générations’. Les personnes nées après 1980 n’accepteront plus que l’écart de prospérité continue à se creuser d’ici la fin de la décennie, dit-elle. 

La banque écrit que ‘d’ici 2030, les investisseurs, et par extension la société dans son ensemble, devront se préparer à des années compliquées, avec des problèmes climatiques, une rivalité permanente entre les États-Unis et la Chine et, surtout, des tensions intergénérationnelles’.

Dans un mémo aux clients, la société française Natixis reprend aussi ce point. La banque prévoit en effet ‘une crise sociale et politique inévitable’ qu’elle appuie par plusieurs graphiques qui reflètent les problèmes rencontrés à l’heure actuelle.

Dans les pays de l’OCDE, le capital (la richesse existante) croît plus rapidement que les salaires des travailleurs. Cela signifie que ceux qui sont déjà riches le sont de plus en plus. En revanche, les salariés ont beaucoup plus de mal à se constituer un capital.

Les salaires augmentent moins vite que le capital

Un premier graphique montre que le revenu réel par habitant (ligne grise) a augmenté moins rapidement que le prix des actifs (ligne violette = immobilier + obligations + actions).

On voit ensuite que les prix de l’immobilier ne cessent d’augmenter…

Les jeunes familles éprouvent donc de plus en plus de difficultés à acheter leur propre maison. Ils gagnent de moins en moins, alors qu’une maison coûte de plus en plus cher.

…tout comme les prix des actions…

Ainsi, quiconque entre en bourse aujourd’hui paie également une taxe supplémentaire. Cela se fait sous la forme d’un prix beaucoup trop élevé.

Comme les salaires augmentent moins vite que le PIB, les bénéfices des entreprises augmentent, ce qui fait monter le prix des actions. En cas de crise, les entreprises peuvent rapidement rétablir leurs bénéfices (voir graphique ci-dessous). Mais cela se fait souvent au détriment des salaires des travailleurs. Par exemple, le vide apparu pendant la crise financière a souvent été comblé par la ‘gig-économie’.

En outre, les salariés ayant le statut d’indépendant gagnent non seulement moins, mais sont également moins protégés. Le problème de l’Uber et d’autres géants de la sous-économie en est probablement la meilleure illustration. 

Une étude récente confirme que si les employés américains étaient payés de la même manière que dans les années 1970, ils gagneraient aujourd’hui 92.000 dollars par an, au lieu des 50.000 dollars qu’ils emportent aujourd’hui chez eux.

Le ‘Capitalisme au XXIe siècle’ de Piketty

La thèse (2014) a été formulée par  l’économiste français Thomas Piketty :

French economist Thomas Piketty is on display at the American Bookstore in The Hague, The Netherlands, 04 November 2014. EPA/MARTIJN BEEKMAN

Ce dernier explique que ‘depuis le début du capitalisme libéral, le rendement du capital a toujours dépassé la croissance économique. En conséquence, les propriétaires du capital (les riches) se sont enrichis plus rapidement que ceux qui dépendaient du travail pour leurs revenus (car les salaires n’augmentent qu’avec la croissance économique, ce qui stimule la demande)’.

Piketty conclut que ‘le capitalisme n’est pas un système dans lequel chacun a sa chance, mais un système qui concentre naturellement la richesse entre les héritiers d’une petite aristocratie financière’.

Covid-19

La crise sanitaire a exacerbé cette situation, car…

Les salaires baissent…

…alors que le chômage augmente

La politique monétaire de plus en plus expansionniste des banques centrales contribue également au problème. Parce que cela ne fait qu’augmenter le prix des biens immobiliers et des actions.

La banque commerciale française conclut que cet écart deviendra insoutenable à long terme. C’est pourquoi les changements sociaux et politiques deviennent inévitables.

Cela peut se produire de trois façons :

  1. La répartition des revenus devrait mieux récompenser les salariés. Cela permettrait également de résoudre le problème de l’inflation. Ceux qui gagnent plus peuvent aussi dépenser plus, ce qui augmente la demande et fait monter les prix.
  2. Les banques centrales doivent mieux contrôler la masse monétaire, ce qui permettrait de stabiliser le prix des actifs. À long terme, cela devrait également profiter au taux d’intérêt. Lorsque l’argent reprend de la valeur, le taux d’intérêt augmente.
  3. Si aucune des solutions ci-dessus n’est réalisable, parce que les employeurs sont trop puissants et que les banques centrales veulent éviter une crise de la dette, seule une taxe sur le capital (plus élevée) reste possible.

Plus