La Chine est passée en quelques décennies d’une société largement agricole à une nation industrielle, pour devenir la seconde plus grande puissance du monde, derrière les États-Unis. Mais le président chinois Xi Jinping ambitionne bien plus. Et pour permettre à la Chine de ravir sa première place aux États-Unis, il faudrait que le yuan s’impose comme la devise dominante du monde.
C’est ce que spécule Jeffrey Moore, senior analyst chez Global Risk Insights. Il affirme qu’en 2018, la Chine pourrait imposer sa monnaie pour qu’ellesupplante le dollar comme monnaie de référence internationale. Le yuan (aussi appelé renminbi) remplacerait alors le dollar dans la plupart des transactions portant sur les matièrespremières. En effet, les importations de pétrole de laChine représentent 12 % du total mondial, ce qui fait d’elle le plus gros importateurdu monde de pétrole. Elle importe aussi plus de la moitié de l’aluminiumproduit sur la planète, et presque la moitié de l’acier et ducuivre. Cela lui confère un énorme pouvoir pour imposer sa monnaie.
Un telscénario aurait une influence sur près de 40 % de la production mondiale depétrole. Ainsi, si la Chine imposait le yuan pour payer ses achats de pétrole.elle éviterait l’emploi de 876 milliards de dollars, ce qui mènerait à unedévaluation massive du dollar.
La suprématie du dollar
64 % des réserves en devises des banques centrales mondiales sont constituées de dollars. Plus de 85 % des transactions des marchés deschanges mondiaux portent sur le dollar; de même, 39 % de toutes les dettesémises le sont en dollars. À cela, il faut ajouter le fait que plus d’un tiersdu PIB mondial provient de pays dont les devises sont indexées au dollar. Enconséquence, une dévaluation massive du dollar serait une véritablecatastrophe. Elle provoquerait une gigantesque inflation aux USA, ébranleraitles marchés de la dette tout autour du monde.
Le yuan gagne du terrain
Ces dernières années, le yuan a gagné de l’importance. Ilest devenu une monnaie de référence pour le fonds monétaire international (FMI),qui l’a inclus dans le panier des droits de tirages spéciaux (DTS) aux côtés dudollar, de l’euro, de la livre sterling et du yen. La Chine a déjà manifestéqu’elle souhaitait développer l’usage du yuan dans les transactionsinternationales. Depuis plusieurs années, le pays conclut des accords avec sespartenaires commerciaux pour effectuer les paiements de ses échanges bilatérauxen yuan. Au mois de juillet dernier, la Chine a proposé de régler son pétrole àl’Arabie Saoudite en yuans. Même si l’Empire du Milieu a réduit la part de l’ArabieSaoudite dans son approvisionnement en or noir, elle demeure le principal acheteur de ce pays, cequi ne laisse guère de choix à ce dernier.
Une transition graduelle… pour l’instant
Cette disruption semble progresser graduellement pour lemoment. Mais selon certains experts, une transition du dollar au yuan pourraitêtre extrêmement rapide, éventuellement du jour au lendemain, si elle survientà la suite de chocs géopolitiques.
A la fin de l’année dernière, la banque danoise Saxo Bank apublié comme à son habitude une liste de 10 prédictions « scandaleuses » pour l’année à venir, c’està dire des 10 cygnes noirs qui pourraient selon elle se produire en 2018. Les « cygnes noirs » (‘Black Swans’), sont des événements extrêmes qui surprennent etont un impact majeur, puis sont rationalisés par des explications a posteriori.
Elle avait notamment prédit que la Chine pourrait déployerun ‘ »petro-renminbi », c’est à dire, que la Bourse Internationale del’Energie à Shanghai pourrait décider de régler toutes ses importations de pétroleavec des contrats à terme basés en yuan, et non plus en dollars.