Utilisation, fabrication, livraison: voici l’impact écologique de votre smartphone

A l’heure de la COP26, les émissions en gaz à effet de serre des différents secteurs et outils du quotidien sont passés au crible. Le smartphone n’y échappe pas. Autant dans son utilisation pour regarder des vidéos ou envoyer des photos, que dans sa production, il pollue. Analyse.

Comme rouler 535 kilomètres en voiture. Les émissions de carbone liées à l’utilisation des smartphones sont en nette augmentation. Greenspector, une entreprise française spécialisée en énergie pour les services numériques, a fait les calculs. Notre usage quotidien du smartphone, en moyenne, est de deux heures et demie par jour. Cette utilisation correspond, en émissions de gaz à effet de serre (via la moyenne des émissions des dix app prises en compte, voir ci-après), à une distance de 1,4 kilomètres parcourus en voiture*, c’est-à-dire 165 grammes de CO2**.

Sur un an donc, 535 kilomètres, ou 60 kilogrammes de CO2. En Belgique, un citoyen émet en moyenne entre 7 et 10 tonnes de CO2 par an, l’usage du smartphone représente donc moins d’un pourcent.

Aussi, un peu plus de la moitié des habitants de la Terre, 4,33 milliards de personnes, utilisent activement les réseaux sociaux, et 80% du temps passé sur ces services l’est via un smartphone. Avec ces chiffres, les émissions totales, par an, sont de 262 millions de tonnes, soit environ la moitié des émissions d’un pays comme la France, et le double de la Belgique (environ 115 millions).

Ces émissions sont une moyenne, et varient fortement d’un réseau social à un autre. Selon les calculs de Greenspector, TikTok arrive en tête, avec 2,63 grammes de CO2 émis par minute de visionnage, et Youtube en dernier, avec 0,46 grammes.

Comment sont calculées les émissions?

Le calcul des émissions prend en compte trois éléments. Les data centers, le réseau, et la consommation de l’écran même. Les émissions viennent de la consommation en électricité, encore majoritairement issues de la combustion de ressources fossiles.

Les data centers, centres où se trouvent les serveurs qui gardent les informations, les vidéos de TikTok, les likes d’Instagram et les offres d’emploi de Linkedin, sont énergivores. Doublement souvent, car ils ont besoin d’électricité pour tourner, et pour être refroidis. Selon des chercheurs, cités par CNBC, ces centres utilisent plus de 200 térawatts/heure par an, ce qui représente 1% de l’utilisation mondiale annuelle de l’électricité. La Belgique entière, à titre de comparaison, consomme 400 térawatts/heure. Le nombre de data centers augmente tous les ans.

Ensuite, pour que l’information vienne du centre au smartphone, il faut passer par le réseau. Le réseau lui aussi est énergivore. Les antennes et autres émetteurs ont besoin d’électricité pour fonctionner. La 5G, de plus en plus déployée, demande encore plus d’électricité. Les experts interrogés estiment tout de même que les transmetteurs de réseau, tout comme les centres de données, deviennent plus performants avec le temps, en utilisant de moins en moins d’énergie.

Au final, le smartphone utilisé pour regarder les TikTok, Twitch et Twitter doit aussi être chargé pour fonctionner. Un élément qui n’est pas pris en compte dans ce calcul d’émissions cependant est la fabrication et le transport. Les mines pour les métaux, les moulages du plastique, le transport en bateau, etc. émettent aussi des grandes quantités de gaz à effet de serre.

De plus en plus de smartphones

Selon les chiffres de Statista, repris par CNBC, il y a plus de 14 milliards de smartphones (et tablettes) dans le monde. En 2025, il y en aura plus de 18 milliards. L’augmentation constante est due à plusieurs éléments. D’abord, il y a tout le temps de nouveaux modèles, avec de nouvelles fonctions, et les consommateurs, souvent, veulent avoir « le dernier modèle ». Apple par exemple annonce avoir vendu pour 38 milliards de dollars en iPhones sur le dernier trimestre, 12 milliards de dollars en plus que le même trimestre l’année précédente.

Ensuite, dans cette masse de smartphones, peu sont recyclés ou réparés. S’ils ne fonctionnent plus, ou qu’un modèle plus récent est acheté, les smartphones finissent dans un tiroir ou une poubelle. Ils ont ainsi une durée de vie deux ans et demie environ.

Les déchets électroniques, en 2021, devraient s’élever à 57,4 millions de tonnes. Sur les téléphones jetés, le recyclage, pour réutiliser les métaux par exemple, n’est pas évident. La majorité des téléphones sont broyés et ainsi de nombreuses matières sont perdues. En Belgique cependant, le recyclage est de plus en plus pratiqué. Sur l’année 2020 par exemple, Recupel, qui récupère des déchets électroniques, a reçu 123.840 tonnes d’appareils inutilisés, défectueux, et ampoules. Cela correspond à plus de 43 millions d’appareils. 92,7% ont « reçu une valorisation utile », indique l’entreprise sur son site, c’est-à-dire une remise en état ou la récupération des matières premières.

Une autre solution pointée par les experts interrogés par CNBC est de faire en sorte que les appareils aient une plus longue durée de vie. Ils critiquent par exemple le fait que les smartphones ne soient que difficilement réparables. Une batterie est par exemple collée à l’intérieur, et si elle arrive en fin de vie, elle ne peut être remplacée, et l’utilisateur jette le téléphone. A voir si une meilleure réparabilité peut être adoptée par les acteurs d’un marché qui demande du neuf constamment.

* L’étude prend en compte les émissions d’un « véhicule léger moyen en France ».

**On ne parle pas véritablement de grammes de CO2, mais de grammes équivalent CO2 (gEqCO2). Les autres gaz qui contribuent aux effets de serre sont ainsi rapportés aux molécules de CO2, pour avoir une référence commune.

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