Unit4 : acteur global avec ancrage local


Rédigé avec la contribution de Unit4

Ces dernières années, le secteur du logiciel financier a subi une profonde transformation, qui a permis à des acteurs ERP s’adressant aux sociétés de services de se mettre en valeur. L’un de ces acteurs s’appelle Unit4, un nom qui n’est pas très connu dans nos contrées, mais qui existe déjà depuis plus de 40 ans. Le moment est donc venu de discuter un peu avec Lode Maris, président régional pour l’Europe occidentale. Actif depuis plus de 10 ans au sein du groupe dans différents rôles, Lode sait parfaitement de quoi il parle. 

Lode Maris, Unit4

Pour qui travaille Unit4 et quelle est la particularité de votre logiciel financier ?

Lode Maris : Nous sommes un acteur « SaaS midmarket » qui s’adresse surtout aux prestataires de services plus professionnels travaillant souvent dans le cadre de projets, tels que les groupes de consultance, les firmes IT et les entreprises d’ingénierie. Nous travaillons également pour des prestataires de services financiers, des assureurs et des firmes de capital-investissement, ainsi que pour des acteurs du secteur de l’enseignement, comme les hautes écoles et les universités, du secteur public et du secteur non marchand. Nos solutions s’étendent de la comptabilité de base à l’ERP en passant par la budgétisation complexe ou la planification financière. Selon les analystes et les clients, nous possédons le logiciel le plus flexible du marché. Cela présente un certain nombre d’avantages : il ne nécessite aucun travail sur mesure et peut donc être implémenté plus rapidement et avec moins de risques. Et la plus grande valeur ajoutée de notre logiciel réside dans le fait que les clients peuvent effectuer eux-mêmes leurs adaptations. 

Où se situe exactement la force de votre système ?

Lode Maris : La rapidité et la précision avec lesquelles il peut effectuer des simulations, ce qui facilite la planification de nos clients. Dans la pratique, vous donnez à différentes équipes au sein de l’entreprise (finance, opérations…) les outils nécessaires pour bien regarder en arrière, mais surtout pour mieux envisager l’avenir. Et tous ces outils reposent sur les mêmes données. En d’autres termes, il n’y a qu’une seule version de la vérité. D’un point de vue pratique, toute l’entreprise est alignée et tout le monde est inclus dans la planification financière et l’exercice de budgétisation, sans que cela ne demande trop de travail manuel au CFO et à son département. Comme beaucoup sont impliqués dans le processus de manière technologiquement accessible, l’ensemble du processus permet finalement une meilleure prise de décision. 

Comment Unit4 s’est-elle positionnée en Belgique et avec quelle stratégie ?

Lode Maris : En Belgique, notre plus grand défi a toujours été la notoriété : nous faire connaître des entreprises qui sont à la recherche de nouveaux logiciels financiers, comme l’ERP ou les solutions de planification et d’analyse financières ou même de comptabilité ordinaire. Nous avons toujours choisi soigneusement les projets auxquels nous avons participé. En intégrant le processus de sélection, nous savions que nous serions en mesure d’apporter une valeur ajoutée suffisante et donc que nous avions de bonnes chances de remporter le marché. Et une fois sélectionnés, il était important de bien implémenter ces projets, car nous existons grâce à nos clients, nos références. Cette stratégie n’est pas évidente, car en tant que CFO aujourd’hui, il est beaucoup plus sûr de choisir un grand nom. En effet, même en cas de problèmes, on ne pourra jamais vous reprocher votre choix. 

Quelle est l’importance du marché belge et y a-t-il de grandes différences avec les autres pays ?

Lode Maris : Ma réponse est double. Pour les sociétés de consultance, l’endroit où elles opèrent ne fait pas de différence. Les différences sont surtout nombreuses dans le secteur public en raison, notamment, des législations locales en vigueur en matière de reporting. Nous constatons toutefois aujourd’hui que tout commence à se ressembler de plus en plus. Ainsi, une entreprise publique aux Pays-Bas sera, dans les grandes lignes, sur la même longueur d’onde qu’une entreprise équivalente en Belgique. Les budgets deviennent de plus en plus serrés, ce qui nécessite un contrôle plus strict. Travailler le plus efficacement possible est un défi qui se pose dans tous les pays. Le marché belge est important et les travailleurs belges sont d’ailleurs très appréciés pour leur flexibilité et leurs compétences linguistiques.

Pouvez-vous expliquer un peu plus comme se déroule le choix des projets ? 

Lode Maris : Nous procédons à un screening minutieux en amont. Et nous ne participons pas aux projets pour lesquels le client potentiel ne fait pas preuve de suffisamment d’ouverture. Les meilleurs projets sont ceux où nous pouvons collaborer avec nos clients. Nous avons besoin d’eux, ils ont besoin de nous. Nous voulons aider nos clients à réaliser leurs principaux objectifs, et notamment mener à bien les clôtures mensuelles et annuelles et réduire drastiquement les cycles budgétaires et les rendre plus efficaces. C’est cela l’enjeu. Nous ne nous arrêtons pas à de la simple comptabilité. Chaque projet s’articule autour de la trilogie prix, qualité et temps. Il faut pouvoir naviguer entre ces trois éléments et tenter de trouver un équilibre réaliste. Au début d’un projet, nous insistons donc toujours sur l’ordre de grandeur des coûts. En fonction de l’objectif du client, il peut y en avoir plus ou moins. Pour nous, il doit cependant y avoir suffisamment de complexité, car si c’est trop simple, le retour sur investissement est trop faible et des alternatives moins chères existent sur le marché. Au final, 80 à 90 % de l’activité doivent pouvoir être réalisés avec l’application standard. 

De nouvelles tendances sont-elles apparues ces dernières années ?

Lode Maris : Aujourd’hui, les entreprises sont tellement sous pression qu’elles manquent constamment de temps. Nos clients commencent par conséquent de plus en plus à se décharger de certaines tâches. Dans ce contexte, le SaaS, ou Software as a Service, prend de plus en plus de place sur le marché. Les clients n’achètent plus le logiciel et n’effectuent plus les mises à jour, mais ils contractent un bail. De nombreux prestataires y ajoutent le service en plus. Notre client typique subit également de nombreux changements, surtout les entreprises qui effectuent beaucoup de reprises. Celles-ci doivent pouvoir intégrer rapidement de nouvelles entités et faire des simulations de planification financière. Si je modifie la structure de mon groupe, quelle influence cela aura-t-il sur mon P&L ? Bref, nos clients veulent pouvoir gérer de manière dynamique l’évolution des conditions du marché. 

Avez-vous pu adapter votre organisation à cette évolution ?

Lode Maris : Nous n’avons pas modifié notre business model : nous voulons continuer à proposer un logiciel le plus standard possible, avec le moins de services possible. Notre modèle vise à ce que nos clients deviennent opérationnels le plus rapidement possible, avec un package le plus standardisé possible. Nous disposons d’un modèle adapté pour chaque type de client, ce qui minimise le risque d’implémentation tout en permettant une exécution plus rapide et permet à nos collaborateurs de se concentrer simultanément sur différents clients. Et pour ces services, nous faisons de plus en plus appel à des partenaires. Pour les tâches de maintenance ordinaires, les tarifs journaliers des fournisseurs de logiciels sont beaucoup trop élevés par rapport à des entreprises spécifiques telles que BDO, Arribatec ou Tobania. Et avec les années, nous constatons aussi que de plus en plus de travailleurs indépendants entrent sur le marché. 

Vous affirmez qu’un client est davantage devenu un partenaire. Partagent-ils cette vision ?

Lode Maris : Nos clients voient déjà les choses de cette façon, mais ce n’est certainement pas le cas de toutes les entreprises. Nous existons grâce à la qualité des projets que nous réalisons chez nos clients. Nous aurions beau réussir 9 projets sur 10, si un seul projet se passe mal, cela risque d’avoir une résonance trop négative sur ce marché de taille relativement modeste. Nous ne pouvons pas nous le permettre. 

Quid de la concurrence ? 

Lode Maris : Dans le segment inférieur de notre marché, il est important que le prix soit toujours très abordable. Il s’agit d’un environnement de personnalisation, à l’opposé de ce que nous faisons. Nous proposons notre logiciel standard que nous préférons adapter le moins possible au client. Chacun possède son propre modèle et tout dépend du modèle que le client recherche. En fin de compte, dans le segment inférieur du marché, nous demandons « jusqu’où nous pouvons aller ». Et dans le segment supérieur, nous demandons « où nous devons aller ». 

Ces deux dernières années, nous avons été frappés de plein fouet par une pandémie mondiale. Les clients peuvent-ils continuer à regarder de l’avant dans ces conditions très instables ?

Lode Maris : L’environnement est devenu à ce point instable pour nos clients que vous obtenez souvent des résultats différents en fonction de l’horizon que vous envisagez. Le grand avantage de notre logiciel est qu’il permet d’effectuer toutes sortes de simulations. Nos clients ont donc plus facile à imaginer des scénarios et sont en mesure de réagir très rapidement avec leurs différentes activités en fonction de cette volatilité. Ils peuvent plus facilement visualiser et évaluer l’impact d’une donnée sur leurs activités. En d’autres termes, nous leur donnons les outils nécessaires pour adapter rapidement la structure de leur l’entreprise. 

Dans quelle mesure est-il difficile de recruter les bonnes personnes et cela pèse-t-il sur votre croissance ?

Lode Maris : Comme beaucoup d’autres organisations, nous avons des difficultés à trouver les bons profils. De plus, il n’est pas toujours facile de garder les gens dans ce monde numérique. Pouvoir intégrer rapidement de nouveaux collaborateurs constitue un véritable défi. Nous avons mis en place un programme spécialement conçu à cet effet. Nous utilisons également nos propres outils et données pour pouvoir nous adapter plus rapidement. Nous disposons d’un centre R&D en Pologne et à Lisbonne et nous allons bientôt en ouvrir un à Jakarta, car nous constatons que nous devons répartir nos risques. Au bout du compte, pour retenir les gens au sein de l’entreprise, il faut pouvoir leur proposer un travail qui présente une valeur ajoutée. Moins ils ont besoin de temps pour traiter des données, par exemple, plus ils en ont pour pouvoir les interpréter. 

Quelle importance vont prendre le big data, l’intelligence artificielle et l’apprentissage machine ?

Lode Maris : Une importance énorme : la connaissance, c’est le pouvoir, et la prévisibilité est essentielle. Tout le monde a intérêt à ce que les données puissent être mieux analysées par les gens, mais aussi par les machines. Et en tant que fournisseur de logiciels, vous devez pouvoir faire la différence. Selon moi, le principe Pareto restera d’application : 80 % automatisés et 20 % d’exceptions, qui devront toujours être interprétées par des personnes. Et face à la pénurie actuelle, ces personnes doivent pouvoir travailler dans les conditions les plus efficaces et les plus efficientes possibles. Plus les tâches pourront être automatisées, mieux ce sera. Toutes les tâches répétitives et chronophages disparaissent progressivement. C’est sa capacité d’adaptation qui permettra à une entreprise de faire la différence et de faire partie des gagnants. 

Comment évolue le rôle d’un CFO ?

Lode Maris : Historiquement, le CFO a toujours été la personne responsable des chiffres. Dans de nombreuses entreprises, on constate aujourd’hui que le CEO s’appuie beaucoup sur son CFO et que ce dernier participe beaucoup plus à la conduite de l’entreprise. Sur la base des données, il/elle est capable de proposer des solutions adéquates pour des questions d’importance stratégique. L’instinct ne joue quasiment plus aucun rôle dans la prise de décision. Notre logiciel permet de créer des tableaux de bord très interactifs qui permettent au CFO et à ses contrôleurs, et à l’ensemble du département en fait, de mieux contrôler la situation actuelle, mais aussi l’avenir. Un outil qui permet au CFO et à son département de devenir un véritable partenaire de la branche opérationnelle et stratégique de l’entreprise.

Avec TA Associates, vous avez récemment accueilli un nouvel actionnaire chez Unit4. Cette arrivée a-t-elle changé beaucoup de choses ?

Lode Maris : Avec TA Associates, nous sommes sur la même longueur d’onde. Nos stratégies sont quasiment les mêmes, à quelques inflexions près. Nous travaillons toujours comme un acteur global avec des ancrages locaux. La proximité avec nos clients est essentielle et nous continuerons d’y accorder une grande importance.