Riches en cryptos et pourtant nuls en techno, voilà les traders de shitcoins

De nombreux investisseurs en cryptomonnaies ne comprennent pas grand-chose aux technologies qui animent ce marché émergent. Par contre, ils ont vite cerné l’opportunité de gagner de l’argent rapidement et trompeusement sans effort.

Pourquoi est-ce important ?

Le terme shitcoin fait référence à une cryptomonnaie ou un token avec peu ou pas de valeur, sans objectif immédiat ou discernable. Cette expression péjorative décrit souvent les altcoins, les devises numériques qui ont été développées après le bitcoin. Avec une petite capitalisation de marché, un shitcoin attire souvent par la flambée subite de son prix. Mais il marque plus durablement les esprits par l'effondrement tout aussi brutal de son cours, et avec lui la disparition des fonds investis par des particuliers.

La magie de la spéculation financière accessible à n’importe qui. Sans connaissances et sans grandes analyses, des particuliers s’improvisent ainsi gestionnaires d’actifs numériques. Le chroniqueur Ben Munster du site spécialisé Decrypt nous livre le portrait de ces nuls de la crypto qui empochent un joli magot. À l’instar de ce « trader de shitcoins », un quadragénaire qui a investi beaucoup d’argent sur ce marché où il ne parvient pourtant toujours pas à différencier Poocoin, NFT et Ethereum.

Il a misé sur ces produits financiers « vraiment bons » mais ne peut manifestement pas motiver de vraie stratégie de placement. Pourtant, ses activités de trading, opérées en marge de son boulot officiel, se montrent florissantes. Elles ne lui rapportent pas suffisamment pour conduire sa propre Lambo mais lui offrent déjà une certaine sérénité financière pour son shopping immobilier.

En tout cas, ce représentant des masses silencieuses qui gonflent le marché crypto cette année investit sans trop se poser de question. Un comportement qui transparaît jusque dans son appartement, raconte le chroniqueur qui lui a rendu visite. Par exemple, repose sur le rebord d’une fenêtre un mystérieux objet tubulaire ressemblant à un gadget sexuel dernier cri. Il n’en est rien, il s’agit simplement de l’antenne d’un Bobcat pour miner de l’helium (HNT), un appareil qui génère par mois l’équivalent de 150 euros de cette énième cryptomonnaie peu connue.

Le HNT est un jeton numérique déployé sur la blockchain Helium, le « Réseau du Peuple » (People’s Network), une infrastructure sans fil décentralisée. Ledit token vient récompenser les utilisateurs qui fournissent un hotspot et valident le transfert de données sur la blockchain. Ce projet cache certainement un cas d’utilisation technologique intéressant mais ce qui est encore plus intéressant ici c’est l’adoption par des personnes qui ne comprennent pas vraiment ni le but ni le fonctionnement. « Ou qui, soyons honnêtes, n’en ont rien à foutre », ponctue Ben Munster.

Quelques semaines avant que le bitcoin ne vienne tutoyer les 20.000 $ pour la première fois de son histoire, en 2017, le prestigieux magazine The Economist appliquait une grille de lecture toute simple à la flambée des cryptomonnaies: l’envie. Ou plus précisément, ce désir qui torture les admiratifs de la réussite d’autrui. Et The Economist voyait déjà dans cette bulle spéculative la démonstration de la théorie dite du « greater fool ». Autrement formulé, certains investisseurs réalisent des placements pour le moins discutables avec pour seul espoir de vendre à plus fou qu’eux. Ou plus idiot.

Voilà donc une tendance lourde dans l’écosystème né avec le bitcoin : nombreux sont ceux pour qui il importe peu que la crypto révolutionne en profondeur notre société, car une chose est sûre, cela a démocratisé les moyens d’investir. La spéculation, sans scrupule, pour les plus nuls.

Une proposition de valeur sous-estimée par le(s) créateur(s) de Bitcoin qui ne cessera d’exposer certains épargnants mal avisés à de graves préjudices financiers.

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