Pourquoi l’humanité est obsédée par ses poils

Depuis des lustres, l’humanité emploie une kyrielle d’ustensiles afin de supprimer toute pilosité. Malgré l’attirail des produits de rasage des sections de supermarchés et le nombre d’experts en beauté, cette obsession pour l’épilation des hommes et des femmes est biologiquement parlant assez étrange, écrit l’historienne Rebecca Herzig, auteur du livre « Plucked : A History of Hair Removal », dans Business Insider. Mais d’où nous vient cette obsession ?

Herzog explique que la perception des poils a toujours été déterminée par les évolutions culturelles. La spécialiste évoque dans son ouvrage le fait que la peau rasée de près est devenue un impératif culturel et qu’il s’agit d’une conséquence logique des découvertes de Charles Darwin. Grace à sa théorie de l’évolution, la croissance excessive des poils a été interprétée comme un signe de rapprochement entre les animaux et les hommes.

Des exhibitions de monstres et des spectacles de cirques ont souvent présenté des prestations de femmes à barbe et d’hommes avec des faces de chien et au début du 20ème siècle, un excès de pilosité était associé à des déviances mentales et sexuelles.

Au début du 19ème siècle, la situation était cependant différente. Le manque de pilosité des indiens américains était considéré, selon l’historien écossais William Robertson, comme une preuve de la « faiblesse de leur constitution ». De nombreux colons barbus avaient certaines inquiétudes en ce qui concerne la nudité.

Au 20ème siècle, les poils des femmes ont particulièrement attiré l’attention. Ainsi, selon des médecins de début du siècle, les femmes se faisaient du souci à cause d’une pilosité excessive, principalement dans le cou et sur le visage. Les femmes qui se battaient pour leurs droits et pour l’égalité ont été représentées comme poilues sexuellement et leurs détracteurs ont décrit cette pilosité comme un excès de virilité.

L’aversion pour les poils corporels s’est rapidement propagée, influencée par les mouvements d’hygiène raciale accompagnés de codes vestimentaires de moins en moins stricts. Les femmes ont au fur et à mesure découvert plus de parties de leurs corps et l’offre de produits dépilatoires est devenue de plus en plus large. Au début de la deuxième guerre mondiale, la pilosité féminine était considérée par la classe moyenne américaine comme quelque chose de dégoûtant.

Certains produits dépilatoires présents sur le marché ont été la cause de nombreuses blessures et ont même mené à la mort de certaines personnes. Cela a contribué à la fondation de la Food and Drug Administration (FDA), l’autorité américaine en matière de médecine et d’alimentation.

Entre-temps, l’auto-rasage quotidien moderne était déjà devenu une chose courante. Cette habitude a été introduite par l’armée américaine lors de la première guerre mondiale. Les dirigeants militaires appréciaient le rasage car cela aidait notamment à éloigner les poux et  permettait que les masques à gaz s’ajustent mieux sur le visage. Gilette profita de cette tendance des soldats à devoir posséder un matériel de rasage adéquat et lança une énorme campagne de publicité.

De nos jours, le goût actuel pour l’épilation pubienne, péri-anale ou anale doit beaucoup aux médias et principalement à la pornographie. Ainsi, la prévalence d’organes génitaux dénudés dans les films pornographiques a répandu l’idée que l’épilation était attirante et synonyme d’érotisme. Par contre, dans les années 80, les actrices porno posaient généralement avec une pilosité abondante dans les films du genre « beaver », les films castors.

Enfin, des cliniciens américains ont estimé à la fin des années 2000 qu’il était tout à fait inhabituel de traiter une femme de moins de 30 ans qui avait encore des poils pubiens. Herzog conclut en expliquant que notre obsession de l’épilation vient également du fait que nous souhaitons nous distinguer des animaux.

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