Une porte-parole de la branche russe de PepsiCo, Olga Mangova, a confirmé que l’entreprise avait conclu un partenariat avec StartRocket pour diffuser la première « publicité orbitale ». Concrètement, il s’agit de lancer plusieurs cubesats (de très petits satellites) pour qu’ils diffusent des messages publicitaires lumineux dans le ciel nocturne, à la manière des enseignes de néon.
« Nous croyons au potentiel de StartRocket. Les publicités orbitales sont une révolution sur le marché des communications. C’est pourquoi, au nom d’Adrenaline Rush – la boisson énergétique non alcoolisée de PepsiCo Russie, une marque innovante qui soutient tout ce qui est nouveau, et non conventionnel – nous avons convenu de ce partenariat », a expliqué Mangovaa dans un email à la rédaction du site américain Futurism. Pepsi utilisera cette campagne pour lutter contre les « préjugés injustifiés et les stéréotypes » auxquels les gamers seraient en butte, a-t-elle expliqué.
Une technologie qui a été testée avec succès
StartRocket, une startup russe, avait déjà présenté ses ambitions au mois de janvier. Elles consistent à lancer des petits satellites, des « cubesats », pour les placer sur orbite à entre 400 et 500 km d’altitude. A l’aube et au crépuscule, leurs voiles en Mylar réfléchiront la lumière du soleil vers la Terre. Les messages lumineux qu’ils diffuseront à ce moment-là ne seront visibles du sol que pendant 6 minutes à la fois.
La startup affirme qu’elle a testé avec succès sa technologie avec un ballon à hélium qui a lancé l’un de ses réflecteurs dans la stratosphère. Il s’est avéré visible du sol. « Une heure et demie après le lancement, nous avions conclu que cet essai était une réussite », a déclaré Sitnikov, son chef de projet.
Un rejet massif de la communité scientifique
Le concept a pourtant suscité un certain rejet, en particulier de la part de la communauté scientifique. Les astronomes craignent l’ajout d’une nouvelle source de pollution lumineuse, et les problèmes qu’elle est susceptible d’apporter pour leurs travaux de recherche. De nombreux satellites réfléchissent déjà la lumière du soleil vers la Terre pendant quelques secondes. Les plus brillants sont ceux de la constellation Iridium, qui comprend 66 satellites de télécommunication mis sur orbite dans les années 90. Si StartRocket met effectivement son projet à exécution, sa constellation sera aussi brillante, soit d’une magnitude d’environ -8. A titre de comparaison, celle de la pleine lune est d’environ -13, et celle du soleil d’environ -27.
D’autres scientifiques s’inquiètent de la multiplication des débris spatiaux. « L’espace est de plus en plus encombré. Le catalogue public officiel mis à jour par l’armée de l’air américaine contient plus de 20 000 objets en orbite. Moins de 10 % de ces objets sont des satellites actifs, le reste sont des satellites morts, d’anciens corps de fusées et des pièces de vaisseaux spatiaux », souligne Patrick Seitzer, professeur d’astronomie à l’Université du Michigan.
Une exploitation commerciale « inévitable » de l’espace
On peut aussi se demander si les régulateurs autoriseront un tel projet. Selon Randy Segal, une avocate spécialisée en droit de l’espace et satellite au sein du cabinet Hogan Lovells, les instances en charge de la sécurité aérienne, qui pourraient s’inquiéter d’une interférence nuisible avec les avions, pourrait s’y opposer. En outre, StartRocket devra aussi s’attendre à ce que des organisations ou des juridictions de certaines parties du globe s’opposent à l’affichage de publicités au dessus de leurs locaux ou territoires.
Néanmoins, la majorité des scientifiques désabusés semblent avoir déjà admis que cette exploitation commerciale de l’espace était inévitable. C’est aussi l’analyse de Sitnikov, pour qui la commercialisation du ciel nocturne n’est que l’étape suivante logique de la publicité : « Nous sommes régis par les marques et les événements. Le Super Bowl, Coca Cola, le Brexit, les Jeux Olympiques, Mercedes, FIFA, et le mur à frontière du Mexique. L’économie est le système sanguin de la société. Le divertissement et la publicité sont au cœur de ses préoccupations. Nous vivrons dans l’espace et l’humanité commencera à diffuser sa culture dans l’espace. Les pionniers les plus professionnels et les plus expérimentés le rendront meilleur pour tout le monde », assure-t-il. « Nous développons un nouveau média. À l’avènement de la télévision, personne n’aimait la publicité », rappelle de son côté son collègue d’Alexey Skorupsky.
StartRocket prévoit de débuter ses lancements commerciaux en 2021. Elle réalise actuellement un tour de table pour boucler son financement. Et précise qu’un investissement de 20 000 dollars suffira pour acheter huit heures de publicité orbitale.
Mise à jour du 17/04/2019, 09:00 : Lundi, après la vague de colère suscitée par le projet sur les médias sociaux, PepsiCo a changé d’avis, et affirme désormais qu’elle n’avait que pour projet de réaliser un essai en stratosphère pour expérimenter la technologie.