Le seuil garanti des 100.000 euros de dépôt bancaire ne vise qu’à donner un sentiment de sécurité trompeur

Depuis le début de cette année, les dépôts bancaires qui dépassent 100 000 euros ne sont plus garantis par l’État en Autriche. A partir de 2016, cette mesure sera appliquée sur l’ensemble de l’Europe.

Cette règle est une conséquence de la création de l’union bancaire européenne, elle vise à éviter que les contribuables ne soient mis à contribution en cas de faillites des banques. Les banques doivent maintenant détenir davantage de capitaux afin de pouvoir résoudre les problèmes elles-mêmes le cas échéant. En outre, les actionnaires des banques et leurs créanciers seront mis à contribution dans le cadre de la restructuration d’une banque défaillante (ce que l’on appelle le « bail-in », les difficultés étant résolues en interne, et non par des aides extérieures, comme dans le cas du « bail-out »).

Mais cela n’empêchera pas l’Etat d’intervenir pour sauver les banques menacées en faisant appel à l’argent des contribuables, écrit le journal autrichien Salzburger Nachrichten :

Les entreprises ont besoin de leur épargne pour payer leurs fournisseurs, les taxes ainsi que les frais de douane, et par-dessus tout, pour payer les salaires. Il ne faut pas beaucoup d’imagination pour saisir les implications pratiques de cela. Des milliers de travailleurs ne sont pas payés parce qu’une banque a fait faillite et le gouvernement ne fait rien! Les ministres embarrassés expliqueront que ces entreprises auraient dû réfléchir à deux fois avant de confier leur argent à cette banque. Mais vous pouvez parier tout ce que vous voulez qu’après quelques jours de manifestations, le gouvernement cèderait et paierait des millions pour porter secours à cette banque ».

L’année dernière, l’économiste français et ancien politicien de l’UMP Philippe Herlin avait déjà mis en garde contre un scénario similaire. Comme les épargnants les plus riches auront quitté le pays, ou auront mis en place des montages financiers pour protéger leurs actifs, et que les épargnants un peu moins riches auront pris la précaution de répartir leurs économies sur plusieurs comptes pour éviter de dépasser le seuil fatidique de 100.000 euros sur l’un d’entre eux, il ne restera plus à l’Etat qu’à se saisir de la trésorerie des entreprises pour résoudre une éventuelle crise bancaire. En conséquence, celles-ci ne pourraient plus payer leurs salariés et leurs fournisseurs, ce qui provoquerait de multiples faillites et une grave crise économique, expliquait Herlin:

Ce chiffre de 100.000 euros est un pur effet d’annonce destiné à faussement rassurer 95% de la population (les électeurs!) mais il ne tiendra évidemment pas en cas de crise bancaire ».

L’économiste craint une répétition de l’épisode chypriote. Initialement, à Chypre, les déposants de la Banque de Chypre en faillite devaient subir une taxe de 9,9% pour les encours supérieurs à 100.000 euros, et 6,75% pour les soldes inférieurs à ce solde, ce qui aurait dû permettre au gouvernement de ratisser 5,8 milliards d’euros. Mais finalement, ce plan a été retiré et les titulaires de comptes garnis de plus de 100.000 euros à la Banque de Chypre ont dû subir une ponction exceptionnelle de l’ordre de 47,5% du montant qui excédait ce seuil, en échange de l’équivalent en actions de la banque.

À l’avenir, tous les titulaires de compte de certains pays doivent s’attendre à une telle coupe de cheveux, affirme Herlin, qui explique que dans de grandes nations tels que la France, l’Espagne ou l’Italie, les sommes à couvrir se monteraient à des montants astronomiques, probablement de plusieurs centaines de milliards d’euros, ce qui signifie que les gouvernements n’auraient pas d’autre choix que d’abaisser le seuil de 100.000 euros, voire de se servir sur tous les comptes, pour résoudre la crise sans faire appel à une aide extérieure.

La confiscation de l’épargne devient une tendance mondiale, comme vous pouvez le lire ici.

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