Le Covid-19 pousse les grandes entreprises à remettre en question 15 à 20 % de leurs effectifs : la bonne excuse ?

En France, les grandes entreprises licencient à tour de bras. Danone a procédé à 2.000 licenciements, dont 400 à 500 dans l’Hexagone. La chaîne de supermarchés Auchan se sépare de 1.475 employés, en plus des 517 déjà annoncés en janvier. Nokia supprime un emploi sur trois chez nos voisins d’outre-Quiévrain, tandis que la chaîne d’hôtels Accor va supprimer 1.000 à 1.200 emplois. Airbus et Air France, avec respectivement 15.000 et 7.580 licenciements, sont sans surprise les plus grandes victimes de la crise du Covid-19.

Selon les chiffres du ministère français du Travail, pas moins de 620 plans de restructuration concernant 66.000 emplois ont été présentés entre le 1er mars et le 8 novembre 2020. Il s’agit d’un triplement des chiffres par rapport à 2019.

Ce qui étonne surtout, c’est que ces plans soient mis en place par de grandes multinationales telles que Danone et Auchan. Elles ne font pas directement partie des victimes de la crise du Covid-19.

‘Les multinationales se sont beaucoup trop étendues au cours des dix dernières années’

Mais, selon divers cabinets de conseil en gestion, les grandes multinationales se sont beaucoup trop étendues au cours des 10 à 12 dernières années, ‘en l’absence de chocs extérieurs’. Dans les grandes entreprises, cela a conduit à 7, parfois jusqu’à 11 niveaux hiérarchiques entre la direction générale et les employés.

Cette situation va bientôt prendre fin, maintenant que la crise du Covid-19 a rendu nécessaire pour les multinationales le fait de savoir ce que les consommateurs attendent d’elles au niveau local. Pour réaliser des synergies, les entreprises doivent adapter leurs processus en conséquence.

La crise actuelle se manifeste sous 4 formes différentes

La crise actuelle se manifeste sous diverses formes :

  1. La première est la numérisation, qui a radicalement changé le comportement des consommateurs. En début de semaine, une enquête de la société de conseil McKinsey a montré que l’essor des BOPIS – ‘buy online, pick-up in-store’ (achat en ligne, retrait en magasin) – s’est déjà ancré dans la société. 56 % des personnes interrogées dans le cadre de l’enquête de McKinsey déclarent qu’elles continueront à faire du BOPIS après la pandémie.
  2. Ensuite, il y a le travail à distance. Une pratique qui restait exceptionnelle dans plusieurs pays de l’UE avant la pandémie, mais qui devient aujourd’hui la norme au sein de nombreuses entreprises.
  3. En outre, les entreprises sont confrontées à la plus grande crise économique depuis la Seconde Guerre mondiale.
  4. Enfin, la société appelle à une transformation : l’écologie, un nouveau mode de consommation dicté par les Millennials et le vieillissement de la population, les nouvelles possibilités offertes par la technologie, de plus en plus souvent fondées sur la ‘gratification instantanée’. En d’autres termes, tout doit être disponible immédiatement.

Tout cela a des conséquences sur l’emploi: non seulement en termes de savoir-faire, mais aussi en termes de taille de la main-d’œuvre.

La complexité au sein de l’entreprise a été multipliée par 35 au cours des 25 dernières années

Les entreprises doivent donc s’adapter. Si le coronavirus leur a appris une chose, c’est que beaucoup peut-être fait plus simplement. Ce qui survient justement au moment où les entreprises deviennent de plus en plus complexes. Selon Jean-Michel Caye du Boston Consulting Group, la complexité au sein des entreprises a été multipliée par 35 au cours des 25 dernières années. Tout comme les niveaux de gestion, qui n’ont fait que se multiplier. Cela a affecté leur adaptabilité et leur agilité.

Dans de nombreuses entreprises, la crise est donc utilisée comme ‘excuse’ pour procéder à des restructurations de grande envergure. Des principes attrayants tels que l’‘entreprise plus verte’ et la ‘démondialisation’, qui sont généralement en contradiction avec les principes capitalistes, sont mis au frigo pour le moment. On s’attend à ce que la raison d’être d’une moyenne de 15 à 20 % de la main-d’œuvre soit remise en question.

En fin de compte, la seule réalité est que les entreprises n’ont un avenir économique et social que lorsqu’elles font des bénéfices.

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