Le marché du travail japonais n’a jamais été autant sous pression depuis plus de quatre décennies : la pénurie de main d’œuvre fait rage et les employeurs peinent à trouver des candidats pour combler les postes vacants. Il y a actuellement plus d’emplois disponibles que lors du point culminant de l’essor économique que le Japon avait connu dans les années nonante du siècle dernier.Le rapport entre le nombre d’emplois offerts pour le nombre de candidatures est maintenant de 1,48 dans le pays, ce qui signifie que pour 100 candidats, on trouve 148 opportunités d’emploi. La dernière fois que ce ratio était comparable, c’était pendant les Trente Glorieuses, une période de forte croissance économique qui s’est étendue jusqu’au premier choc pétrolier, au milieu des années septante. Il avait alors atteint 1,53, avant descendre à 0,55 avec la crise du pétrole.C’est surtout dans le secteur des services que cette pénurie de main d’œuvre est particulièrement marquée. Des restaurants et des boutiques ont été contraints de réduire leurs heures d’ouverture pour s’adapter à un effectif trop restreint. Mais on manque également de routiers, de maçons et d’employés du bâtiment, de médecins et d’infirmières.
Des causes différentes
Ce qui est remarquable, c’est que la pénurie de main d’œuvre que l’on constate actuellement n’a pas du tout la même nature que celle que le Japon avait connue dans les années nonante. En effet, contrairement à cette dernière, elle n’est pas induite par les créations d’emplois inhérentes à une forte croissance, mais à la baisse du nombre d’actifs, elle-même liée au sévère déclin démographique auquel le Japon est confronté.Chaque année, la main d’œuvre japonaise de réduit de près de 700 000 personnes. Depuis la prise de fonctions du Premier ministre japonais Shinzo Abe il y a quatre ans, la population âgée de quinze à soixante-quatre ans s’est réduite d’environ 3,8 millions de personnes. En conséquence, le taux de chômage a chuté à un niveau record de 2,8 %.Curieusement, cette pénurie de main d’œuvre ne s’est pas traduite par une forte augmentation du niveau des salaires. L’année dernière, elle ne s’est élevée qu’à 0,2 % des salaires. Selon les experts, les chefs d’entreprises redoutent l’alternance de déflation et d’inflation, et ils préfèrent offrir des avantages à leurs collaborateurs, plutôt que leur accorder des augmentations. En outre, ils emploient de plus en plus souvent des travailleurs étrangers, des femmes et des personnes âgées qu’ils rémunèrent moins.