Lors du dernier congrès du parti communiste chinois, le président chinois xi Jinping s’est engagé à faire de son pays un leader mondial en termes de force nationale et d’influence internationale. L’emploi du « soft power » est central dans cette stratégie. Et dans ce contexte, le réseau des instituts Confucius a un rôle essentiel à jouer. Depuis 2004, la Chine a mis en place plus de 1500 de ces centres d’enseignement dans 140 pays, dont 170 sont situés en Europe. Leur organisation est assez similaire à celle de l’Alliance Française, par exemple. Les 1,5 million d’étudiants qui les fréquentent dans le monde peuvent y suivre des cours de chinois et de culture chinoise.
Des chevaux de Troie
Mais certains critiques y voient des chevaux de Troie destinés à modifier la perception que l’Occident a de la Chine, et à diffuser une interprétation différente de certains événements de l’histoire chinoise.Ainsi, selon Willy Lam, un professeur de l’université chinoise de Hong Kong, les instituts Confucius ont pour objectif de répandre une vision favorable du « modèle chinois » de développement et de « corriger » la vision que les intellectuels occidentaux et le public pourraient avoir, selon laquelle « la Chine est un État autoritaire qui piétine les valeurs universelles » :
« Les instituts Confucius servent de base pour permettre à des experts en propagande de Pékin d’infiltrer les universités qui les hébergent et de façonner l’opinion [à propos de la Chine] des chercheurs et des étudiants ».
Pour Perry Link, un professeur à l’Université de Californie, Riverside, les centres sont soumis à une certaine censure, et les écoles payées par l’institut Confucius s’abstiennent tacitement de discuter de sujets tels que le dalaï-lama, l’indépendance de Taïwan, l’immense richesse des dirigeants du parti communiste, ou du dissident détenteur du prix Nobel de la paix Liu Xiaobo, par exemple.Et pour Link, cela risque «d’induire gravement en erreur » le public et les étudiants, et «le fait de présenter cette Chine déformée comme s’il s’agissait de la véritable Chine a des inconvénients ».Pour la Chine, il n’est pas difficile de museler les professeurs qui travaillent dans ces instituts. Beaucoup d’entre eux sont en effet des citoyens chinois qui ont été éduqués sur la base de programmes scolaires évitant consciencieusement ces sujets interdits. Et lorsqu’ils en ont tout de même eu un compte rendu, celui-ci était une version biaisée exempte de toute critique à l’égard des dirigeants chinois.
Marco Rubio
Récemment, John Rogin du Washington Post avait évoqué l’existence d’une campagne chinoise visant à détrôner les Etats-Unis pour installer la Chine comme première puissance mondiale. Pour parvenir à cet objectif, la Chine, à l’instar de la Russie, tenterait d’influencer les institutions américaines.Il aurait ainsi cité une conclusion du sénateur républicain Marco Rubio, qui préside la Commission exécutive du Congrès américain sur la Chine. Ce dernier a lui aussi mis en cause l’Institut Confucius, l’accusant d’avoir signé des contrats pour s’immiscer dans les activités éducatives de certaines universités américaines. « Nous avons beaucoup entendu parler de l’interférence russe dans nos élections, mais les efforts chinois pour influencer notre politique publique et nos libertés les plus élémentaires sont bien plus vastes que les gens ne se l’imaginent », a déclaré Rubio. En conséquence, il a exhorté à examiner tous les activités éducatives effectuées en partenariat avec des instituts de recherche d’origine chinoise.
Confucius : le rôle de l’éducation
La culture chinoise est loin de devenir aussi présente dans notre univers que la culture anglo-saxonne. Des enquêtes de l’institut de recherche Pew Center montrent que les pays occidentaux ont une vision plutôt négative de la Chine. Mais Pékin parie sur le long terme, écrit Politico, qui rappelle une citation du sage Confucius :
« Si tes projets portent à un an, plante du riz ; à vingt ans, plante un arbre ; à plus d’un siècle, éduque les enfants ».