Il n’y aura probablement pas de baisse solide de l’inflation sans récession

Il est de plus en plus clair que l’inflation élevée ne va pas disparaître comme par magie. Cela soulève la question de savoir si les banques centrales oseront vraiment nuire à l’économie pour maîtriser l’inflation.

En Belgique, l’inflation a à peine baissé en juillet, passant de 9,65 à 9,62 %. Au Royaume-Uni, le record d’inflation a même été à nouveau battu. Le seul point positif est que l’inflation américaine est passée de 9,1 à 8,5 %. Cette surprise a été bien accueillie par les marchés. Les investisseurs semblent anticiper que le pire de la douleur de l’inflation est derrière eux. Dans ce cas de figure, on pourrait imaginer que les banques centrales vont progressivement lever le pied. Mais il y a de fortes chances que les investisseurs se réjouissent trop tôt. Le passé et un récent avertissement de la Banque d’Angleterre (BoE) suggèrent qu’il y a peu de chances que l’inflation soit contenue sans que l’économie en souffre.

La hausse des taux d’intérêt est un jeu d’enfant

Ce n’est pas la première fois que l’inflation déraille. Dans les années 1970, particulièrement, l’inflation américaine a dépassé 10 % à quelques reprises. À l’époque, on est parvenu à la faire baisser un peu, mais à chaque fois le soulagement n’était que temporaire. Le tournant n’est intervenu qu’au début des années 1980, lorsque le président de la Réserve fédérale, Paul Volcker, a déclaré la guerre à l’inflation et porté les taux d’intérêt à plus de 20 %. À cet égard, la hausse des taux d’intérêt d’un peu plus de 2 % depuis le début de l’année n’est finalement qu’un jeu d’enfant. Volcker a lui réussi à réduire l’inflation de pas moins de 6 %. Mais l’économie américaine s’était contractée de 2,5 % en raison de la politique de taux d’intérêt sévère.

Attention : une récession s’annonce

Si l’on se base sur cette récession – et sur d’autres périodes au cours desquelles la Fed a fait baisser l’inflation américaine -, il faudrait maintenant un recul d’environ 3 % de croissance. Une grande différence avec les périodes précédentes est que les personnes et les entreprises se sont habituées à une inflation très faible au cours de la dernière décennie. Par conséquent, une inflation élevée est moins susceptible de provoquer de fortes revendications salariales que par le passé. Certains économistes estiment que, dans les conditions actuelles, même une récession de 2 % permettrait à l’économie en surchauffe de se refroidir suffisamment pour que l’inflation tombe à un niveau acceptable pour la Réserve fédérale. De l’autre côté de la Manche, la BoE a averti début août que l’économie britannique entrerait en récession dans le courant de l’année.

S’en tenir au plan

La banque centrale américaine, cependant, continue de s’accrocher courageusement à un scénario dans lequel l’inflation peut être contenue sans que la croissance économique devienne négative. L’histoire montre qu’il s’agit là d’un vœu pieux. Pour le dollar américain, le fait que les États-Unis tombent en récession ne doit pas être un problème du tout. Dans ce cas, l’agitation sur les marchés financiers augmentera. Cela ferait le jeu des valeurs refuges comme le dollar. Mais nous en sommes encore loin. Dans les mois à venir, il sera intéressant de voir si le président de la Fed, Jerome Powell, luttera contre l’inflation aussi vigoureusement que Volcker l’a fait il y a quarante ans, ou s’il optera pour une approche de type « bâton et carotte ».


Joost Derks est un spécialiste des devises chez iBanFirst. Cette chronique exprime son opinion personnelle et ne constitue pas un conseil professionnel (d’investissement).