‘Hyperinflation en Iran? Les sanctions financières des Occidentaux ont en fait aidé le régime iranien à mater la classe moyenne’

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« Hyperinflation en Iran due aux sanctions financières des pays occidentaux » ?  Dans un article explosif de Business Insider, Matthew Boesler explique que l’inflation à laquelle on assiste en Iran ne vient pas des sanctions financières, mais qu’elle est le produit d’une politique monétaire du gouvernement de Mammoud Ahmadinejad qui a pour ultime effet de laminer la classe moyenne iranienne.

On a parlé d’hyperinflation parce que le cours du rial iranien a littéralement plongé en chute libre sur les dernières semaines, passant de moins de 25.000 rials pour un dollar il y a seulement quelques semaines, à environ 35.000 rials pour un dollar au cours de la semaine dernière.

Mais le dollar n’est pas un moyen de paiement très usité dans l’économie iranienne, et le taux de change officiel du rial, qui sert de référence aux conversions des opérations au jour le jour, est demeuré peu ou prou inchangé à la parité d’environ 12.000 rials pour un dollar.

Selon le Dr Djavad Salehi-Isfahani, un économiste de la Virginia Tech expert du Moyen Orient, « Ce que fait le gouvernement iranien est de s’assurer que les sanctions frappent les riches, pour que la classe moyenne iranienne, et non la classe la plus défavorisée, soit la victime des sanctions de l’Ouest ». Salehi-Isfahani affirme que ces classes les plus défavorisées n’utilisent que des rials pour leurs transactions quotidiennes, et qu’elles ne sont pas affectées par l’évolution de son cours, ce que confirme le Dr Juan Cole, un historien social expert du Moyen Orient de l’Université du Michigan.

Avant les sanctions décidées en juillet dernier, l’Iran recevait beaucoup de dollars de ses exportations de pétrole aux pays occidentaux. Les sanctions ont eu pour effet de faire cesser ces transactions, mais la banque centrale iranienne dispose toujours des réserves en dollar accumulées sur les périodes passées, qui n’ont pas été réinjectées dans l’économie. A l’inverse des autres pays où ce sont les transactions au jour le jour qui déterminent la parité du dollar par rapport à la monnaie nationale, en Iran, c’est le gouvernement iranien qui injecte les dollars provenant des ventes de pétrole dans l’économie, et tant qu’il aura des réserves en dollars, il détiendra le contrôle sur la parité du rial par rapport au dollar.

Selon Salehi-Isfahani, le gouvernement a mis en place un système de parités multiples pour le rial. La Banque Centrale d’Iran a dressé une liste de biens en les qualifiant avec une note de 0 à 10 en fonction de leur nécessité. Les biens de première nécessité (la nourriture et les médicaments) sont basés sur le cours officiel du dollar, et le change est pris en charge par le gouvernement. Lorsque les biens sont réputés superflus, leur cours est déterminé en référence au taux du marché non officiel, celui qui a plongé sur les dernières semaines. Les importateurs de produits payés en dollars ont été directement impactés, et ils ont été obligés de se tourner vers le marché des devises parallèles, comme les petites offices de change du Grand Souk de Téhéran, Ainsi, la chute du rial contre le dollar a surtout nui aux petites entreprises d’import/export et aux bureaux de change, qui travaillent avec les dollars.

Depuis son élection à la présidence de l’Iran en 2005, Mammoud Ahmadinejad a mené une politique de réinjection des recettes du pétrole dans l’économie « pour acheter les votes du peuple », selon le professeur Cole, et cette politique a généré une forte inflation. Celle-ci n’est donc pas apparue sur les dernières semaines comme le terme d’ « hyperinflation » pourrait le laisser présager. Ce sont les détenteurs d’épargne en rials qui ont été les plus affectés par ce phénomène, c’est à dire la classe moyenne. En 2009, ce sont des membres des classes moyennes qui étaient descendues dans les rues pour protester contre la réélection d’Ahmadinejad. Les sanctions occidentales, loin de déstabiliser le régime iranien, l’aident au contraire à mater la classe moyenne, conclut le professeur Cole.