La Chine sort l’artillerie lourde pour protéger enfants et adolescents d’un de leurs principaux ennemis : le smartphone

Mercredi, le régulateur chinois du cyberespace a proposé d’imposer une limite de temps d’écran pour les jeunes Chinois de moins de 18 ans. De quoi faire dévisser les entreprises technologiques locales à la bourse.

Pourquoi est-ce important ?

À mesure que les effets néfastes d'un usage trop intensif du smartphone chez les jeunes (et les moins jeunes) sont documentés, les autorités planchent de plus en plus sur des solutions. La semaine dernière, l'ONU préconisait ainsi d'interdire les smartphones en classe. De son côté, la Chine pourrait agir très bientôt, avec des mesures bien plus radicales.

Dans l’actu : l’usage du smartphone par les jeunes bientôt réglementé en Chine ?

  • Mercredi, l’Administration chinoise du cyberespace (CAC) a proposé d’imposer une limite sur le temps passé par les jeunes Chinois sur leur smartphone. Elle a également plaidé pour une régulation du contenu auxquels ils peuvent avoir accès.
  • Dans la foulée, les Big Tech chinoises ont connu des heures difficiles à la bourse.

Quelles sont les mesures conseillées ?

Le détail (1) : un temps d’écran limité en fonction de l’âge.

  • Dans son projet, la CAC donne précisément le temps d’écran maximal qui devrait être imposé aux jeunes Chinois en fonction de leur âge :
    • Deux heures par jour pour les jeunes de moins de 18 ans.
    • Une heure pour les moins de 16 ans.
    • 40 minutes pour les moins de 8 ans.
  • Après 30 minutes d’utilisation, une notification devrait aussi rappeler aux jeunes utilisateurs qu’il est préférable de mettre leur smartphone de côté.
  • Des exceptions devraient être prévues pour les appels d’urgence ou l’utilisation d’applications éducatives (réglementées), précise le régulateur. Le temps d’écran maximal pourrait également être allongé avec une intervention parentale.
  • En outre, selon le régulateur, les jeunes Chinois ne devraient pas pouvoir utiliser leur téléphone la nuit, entre 22h et 6h.

Le détail (2) : un contenu régulé.

  • En plus d’une limite du temps d’écran, la CAC conseille aux autorités de ne permettre aux jeunes Chinois d’avoir accès qu’à certains types de contenus. Là aussi, cela varie en fonction de l’âge :
    • Des chansons et du contenu audio pour les moins de 3 ans.
    • Du contenu éducatif et d’actualité pour les jeunes de 12 à 16 ans.

Les Big Tech devront jouer le jeu

Les interrogations : comment mettre tout cela en œuvre ?

  • Toutes ces mesures ne sont pour l’instant que des recommandations émises par la CAC. Il revient aux autorités de traduire cela dans des textes de loi.
  • Si Pékin vient à suivre ces recommandations (ce qui, selon les analystes, est assez probable), toute la question sera de voir comment elle ordonne que cela soit mis en pratique.
  • De son côté, la CAC estime qu’il devrait y avoir un « mode mineur » à activer sur tous les smartphones vendus en Chine, lequel mettrait en place les différentes mesures limitatives en fonction de l’âge de son utilisateur.
  • Ce « mode mineur » devrait-il être conçu par le fabricant du smartphone, le gérant du système d’exploitation ou encore l’opérateur du magasin d’applications ? L’avis de la CAC est peu clair, mais elle semble en tout cas inviter tous les acteurs de l’industrie à travailler sur ce système.
  • Par la suite, il conviendra aussi de voir comment les autorités chinoises parviennent à s’assurer du fait que le « mode mineur » est bien disponible sur tous les smartphones du pays. Et quelles sanctions sont prévues si ce n’est pas le cas.
  • Quand bien même le « mode mineur » est bien présent partout où il doit l’être, encore faut-il qu’il soit activé par les parents des enfants et adolescents chinois. Et que ces derniers ne trouvent pas des moyens de contourner les mesures restrictives qui leur sont imposées.
    • Sur ce point, l’exemple récent donné par les limitations sur le secteur du jeu vidéo pour les jeunes devrait donner confiance à Pékin.
    • « Bien sûr, il existe des solutions de contournement. Les enfants peuvent obtenir les mots de passe sur les appareils de leurs parents, mais le consensus général est que les restrictions de jeu ont été assez bien mises en œuvre », a commenté auprès de la BBC Ray Wang, fondateur et directeur général du cabinet de conseil Constellation Research basé dans la Silicon Valley.

Les conséquences immédiates : du rouge à la bourse.

  • Peu de temps après l’annonce du régulateur chinois, un (léger) vent de panique a semblé souffler auprès des investisseurs. De nombreuses Big Tech ont ainsi vu leur action chuter.
    • L’action Alibaba a chuté de plus de 5% entre l’ouverture de mercredi et la fermeture de jeudi.
    • Même chose pour Weibo.
    • Baidu a dévissé de près de 3,5% sur ces deux journées.
    • L’action Tencent a baissé de plus de 3%.
  • Plus globalement, l’annonce de la CAC laisse penser que les espoirs d’assouplissement de la régulation du secteur chinois de la technologie étaient finalement peu réalistes.
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