Demi-teinte pour l’Oréal au Brésil

Les femmes brésiliennes comptent parmi les plus grosses consommatrices de produits cosmétiques à travers le monde. Pourtant, la plus grosse société de produits de beauté, L’Oréal, a échoué au Brésil. En effet, les femmes brésiliennes des rivages de l’Amazone jusqu’à Sao Paulo, comme celles des communautés voisines de Rio de Janeiro, ont pris l’habitude d’acheter leurs cosmétiques et autres produits de maquillage aux représentants en porte-à-porte, et pas dans les magasins où L’Oréal distribue ses produits.

Cela fait 50 ans que L’Oréal est présent au Brésil, mais jusqu’alors, la société s’était concentrée sur les produits capillaires. L’été dernier, L’Oréal s’est lancé dans la bataille des cosmétiques et du soin pour la peau. Les deux marchés cumulés représentent moins de 15 % des ventes de L’Oréal au Brésil, alors qu’ailleurs dans le monde, ils comptent pour 50 % des ventes de la marque.

Conquérir les femmes brésiliennes est une nécessité pour L’Oréal pour ajouter un nouveau milliard de consommateurs sur la prochaine décennie, et doubler ainsi son marché actuel. Actuellement, L’Oréal réalise environ un tiers de ses 17,5 milliards d’euros de vente sur les marchés émergents, et il veut en faire la moitié de son chiffre d’affaires pour 2020. Alors qu’en Chine les ventes ont progressé de 18 % chaque année sur les trois dernières années, les ventes au Brésil ont stagné l’année dernière.

« Notre grand défi ici, c’est de créer une entreprise de maquillage à partir de zéro », explique Jean-Paul Agon, Directeur Général de L’Oréal. « Plus le marché se développera, et moins les ventes directes y auront leur place ». L’Oréal n’a pas recruté de vendeurs directs, mais a introduit des esthéticiennes dans les rayons des magasins commercialisant les produits de ses marques. La compagnie prévoit également de lancer une ligne de crème éclaircissante vendue en pharmacie. Une troisième stratégie vise à se positionner sur des produits peu vendus actuellement, comme le fond de teint, fer de lance des gammes de maquillage de l’Oréal, mais que les femmes brésiliennes accusent de faire graisser la peau. Les équipes de recherche-développement de l’Oréal planchent sur une gamme de fonds de teints basés sur des produits plus naturels, et des produits locaux.

Les deux grands acteurs du porte-à-porte se partagent 50 % des ventes de cosmétiques et 42 % des ventes de soins pour la peau. Natura Cosméticos compte un million de représentants à travers le pays, et l’américain Avon Products Inc. a également dépassé L’Oréal au Brésil grâce à son expertise en vente directe. L’échec de L’Oréal illustre bien la compétition qui se joue entre les sociétés de biens de consommation d’envergure mondiale, et les rivaux sur place qui connaissent bien les spécificités des marchés locaux. La vente en porte-à-porte est une tradition au Brésil qui emploie 2,5 millions de femmes sur un total de 42 millions de femmes actives.