Comment les plus gros propriétaires terriens européens se remplissent les poches avec l’argent du contribuable

« De nos jours, l’extrême richesse en Europe – qu’elle ait été gagnée ou qu’elle ait été héritée – n’est pas seulement quasiment exemptée de tout impôt ; elle est aussi un aimant pour les fonds publics », écrit Don Quijones, un journaliste du blog Wolf Street qui vit à Barcelone, en Espagne.

Il cite l’exemple des plans de sauvetage des banques, mais aussi la Politique Agricole commune (PAC), rappelant qu’elle représente plus de 40% des 132 milliards d’euros du budget de l’UE, et que son attribution est basée sur la surface des terrains détenus par les bénéficiaires. En clair, plus l’on possède de terrains, et plus l’on touche de subventions.

Par exemple, 80% des 2 milliards d’euros de PAC versés à l’Andalousie ont été empochés par les propriétaires terriens, et seulement 200 millions d’euros ont bénéficié à des travailleurs ruraux.

On observe la même chose à travers toute l’UE, et bien sûr, ce phénomène est particulièrement accentué dans les pays où la propriété foncière est répartie de manière très inégale, comme c’est le cas en Espagne ou au Royaume Uni. Dans ce dernier, 0,6% des propriétaires terriens détiennent 69% des terres. Le New Statesman a observé que le foyer britannique moyen payait 245 livres pour financer la PAC, alors que la plupart des fonds alloués au pays étaient versés à de très riches propriétaires terriens, tels que le Duc de Westminster, qui a reçu 1,1 million d’euros de subventions en 2011, ou le Duc de Moray, qui lui a perçu 1 million d’euros, par exemple.

La noblesse terrienne n’est pas la seule à profiter des largesses de l’UE, puisque les compagnies des eaux Yorkshire Water, Welsh Water, Severn Trent et United Utilities ont perçu respectivement 290.000 livres, 330.000 livres, 650.000 livres et 1,3 million de livres de subventions de fermage, tandis que Serco, une firme de logistique et de transport, a reçu 2 millions de livres pour les terres cultivables qu’elle détient.

Selon George Monbiot, le plus gros bénéficiaire de la PAC est une mystérieuse compagnie basée en France, appelée Syral UK Ltd. D’après son site internet, elle fabrique de l’amidon, de l’alcool et des protéines. Elle a perçu 18,7 millions de livres au titre de la PAC, sans que l’on connaisse son patrimoine terrien, ou ses activités agricoles, mais Monbiot spécule que cela pourrait prendre la forme de subventions à l’exportation.

En dépit de son coût et des déséquilibres qu’elle a induits dans les échanges entre l’UE et les autres régions du monde, la PAC, qui fait l’objet d’un intense lobbysme, a été maintenue. Certains pays, dont l’Italie, ont décidé de plafonner les subventions, et la Commission européenne souhaite limiter les subventions à 300 000 euros par bénéficiaire. Mais cette proposition a déjà recueilli une vive opposition de la part de lobbyistes et de gouvernements, dont ceux de l’Espagne et du Royaume Uni, et il n’est pas évident qu’elle pourra être retenue.