Le ralentissement de la croissance de l’économie mondiale n’est pas de nature cyclique mais structurelle, et les taux de croissance que nous avons connus depuis les années nonante du siècle dernier appartiennent au passé. C’est la conclusion d’un rapport discret coécrit par la Banque mondiale et le FMI, et publié dans le numéro de décembre du magazine du FMI « Finances & Développement ».
Nous avons assisté à de profonds changements dans l’économie depuis 2008 : la croissance des transactions commerciales internationales a fortement chuté, et sur les deux dernières années, le commerce mondial a connu une croissance plus faible que l’ensemble de l’économie.
Le rapport rappelle que des économistes ont évoqué la fin de l’ère de « l’hyperglobalisation », une période au cours de laquelle le commerce mondial progressait à un rythme deux fois plus rapide que celui de la croissance économique. Certains expliquent que ce phénomène est cyclique, et qu’il provient de la crise économique, notamment au sein de l’UE, et que le commerce mondial repartira lorsque les problèmes de l’Europe seront résolus. On a également attribué le développement plus lent des échanges internationaux au ralentissement de la libéralisation des économies au cours des dernières années.
Cependant, pour d’autres, le ralentissement actuel est purement structurel, et ils pensent que la progression des échanges internationaux ne stimulera plus la croissance comme elle le faisait jusqu’à maintenant. Au cours des dernières années, la Chine, qui domine le monde sur le plan des échanges commerciaux, a mené une politique destinée à favoriser la construction d’usines sur son territoire, aidée en cela par des apports massifs de capitaux étrangers qui ont permis l’amélioration de sa chaîne d’approvisionnement domestique. En conséquence, le pays est mieux à même de satisfaire sa demande intérieure, et les importations ont chuté. Ainsi, alors que les pièces détachées représentaient plus de 60% des exportations chinoises en 1993, elles n’en représentent plus que 35% aujourd’hui.
L’adoption de ce nouveau modèle économique a impulsé un changement radical pour la Chine elle-même, mais aussi pour le monde. Il implique que le ralentissement du rythme de croissance des échanges commerciaux mondiaux a un impact sur la croissance mondiale, et conforte l’hypothèse que la croissance molle de nos économies est un « nouveau normal ».
En 2008, le monde était donc non seulement la victime d’une crise économique, mais aussi d’un changement économique profond. Ce nouveau normal de croissance plus faible qui ne peut plus être stimulé par de la dette est aussi menacé par la révolution technologique, et notamment par l’impact de la robotique et des imprimantes 3D. Nous sommes les témoins d’une nouvelle révolution économique mondiale.
Dans ce contexte, on peut s’interroger sur la pertinence du millier de mesures que les dirigeants des pays du G20 ont annoncées la semaine dernière pour stimuler la croissance mondiale, notamment l’injection de 2.000 milliards de dollars dans l’économie, pour ajouter 2,1% au taux de croissance déjà prévu pour les pays membres du groupe pour 2018.
« Après que Bruxelles et les dirigeants des soi-disant économies « saines » du Nord ont sacrifié l’Europe du Sud sur l’autel de leur mégalomanie, le G20 fait de même avec les économies émergentes et le reste du monde encore plus pauvre. L’ancien « monde riche » est pris au piège dans ses propres rêves et modèles erronés et les seuls endroits qui restent pour soutirer un semblant de croissance sont les pays les plus faibles. Une nouvelle version de l’Empire romain.
Si les pays du G20 étaient capables de faire croître la croissance de 2,1% avec la même facilité avec laquelle ils ont émis leurs rapports ce weekend, ils l’auraient déjà fait il y a bien longtemps. Le fait que cela ne se soit pas produit signifie simplement qu’ils ne pourront pas le faire cette fois-ci non plus », écrit Raúl Ilargi Meijer du blog The Automatic Earth.